Changer la gauche

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Qu'attendre des élections au Royaume-Uni ?, par Henry J. Dicks



Il est quasiment certain que David Cameron, le chef de fil du parti conservateur, deviendra le nouveau premier ministre du Royaume Uni en mai 2010, date des prochaines élections législatives. Depuis plus d’un an, son parti devance le parti travailliste d’au moins 10% dans les sondages, et il y a peu de chance que cela change dans les mois à venir. Tout le monde le sait... sauf peut-être Gordon Brown.


Que les choses paraissent, à ce point, jouées d'avance, ne manque pas d'originalité. En voici quelques raisons.

  • Après douze ans au pouvoir et deux victoires législatives consécutives, tout le monde commence à s'ennuyer du "New" Labour, qui n'est plus si neuf, et commence à lasser. Même les électeurs travaillistes les plus fidèles imaginent de plus en plus voter pour le camp adverse.

  • Gordon Brown, qui avait tout joué sur sa capacité à bien diriger les affaires économiques de la nation, a échoué de manière spectaculaire. La crise économique est plus vive ici qu'ailleurs, et le Royaume-Uni est le seul pays du G20 toujours en récession.
  • La gauche a certes un excellent candidat, David Miliband, qui pourrait éventuellement remplacer Gordon Brown, mais il est toujours assez jeune (41 ans) et ne se risquera certainement pas à se lancer dans le défi, alors que les circonstances sont si peu favorables à son parti.
  • David Cameron, relativement populaire, fait peu d’erreurs de jugement. Son parti reste très rétrograde, et il n’a pas de vision spécialement nouvelle pour le pays, mais il n'en a, somme toute, pas besoin face à l'état actuel de la gauche.

Si, pour toutes ces raisons, la gauche ne remporte pas les prochaines élections législatives, que peut-il bien se passer? Après avoir cherché à séduire l'électorat centriste en parlant d’un "nouveau conservatisme" plus sensible à la cause des pauvres, Cameron ménera sans aucun doute le pays vers une droite très ferme, surtout en matière économique. En matière d'affaires étrangères, il maintiendra une position très eurosceptique et renforcera certainement les liens avec les Etats-Unis. Le scepticisme dont fait part son parti à l'égard du réchauffement climatique devrait l'empêcher de mettre en place les changements profonds dont nous avons besoin en matière environnementale.

Et à gauche? Gordon Brown démissionnera. Le remplaçant idéal serait David Miliband. Jeune, populaire, et brillant, Miliband est unanimement reconnu comme l’avenir du parti. A l’âge de vingt-neuf ans, il était déjà le chef de la stratégie politique sous Tony Blair; à quarante et un ans, il est aujourd’hui le plus jeune ministre des Affaires étrangères qu'ait connu le pays depuis trente ans. Cette fonction prestigieuse lui assure déjà de l’expérience au plus haut niveau, de même qu'une présence notable à l'échelle internationale. On peut d'ailleurs s'attendre qu'il adopte, avec l’aide de son jeune frère, Edward Miliband, Secrétaire d’Etat à l’énergie et au changement climatique, une politique beaucoup plus écologique que celle que devrait mettre en place Cameron.

Le bilan est donc moins mauvais que ce qui peut apparaître. La défaite de la gauche paraît inévitable, certes. Mais si la droite mène une politique aussi peu inspirée et rétrograde que ce qui devrait être le cas, la gauche anglaise aura tous les éléments pour se renouveller, et incarner une opposition dynamique et créative. Or, cela vaut peut-être mieux que cinq années supplémentaires de la débâcle actuelle...


Henry J. Dicks

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