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Idées lancées en l'air

Un gouvernement économique européen ?, par Pierre Haroche




Le Président de la Commission européenne, José Manuel Barroso veut pouvoir contrôler les budgets des Etats membres avant leur examen par les Parlements nationaux. La crise grecque a en effet montré que les choix budgétaires de chaque membre de la zone euro finissent par avoir un impact sur l’ensemble de leurs partenaires, et les Etats ont été obligés de se montrer solidaires en créant un fonds de stabilisation. Si les Européens sont solidaires dans les conséquences, n’est-il pas logique qu’ils le soient aussi dans les décisions initiales ?

Oui mais voilà, si l’idée générale de la Commission semble la suite logique de la réponse à la crise grecque, les modalités sont nettement plus contestables. En demandant un droit de contrôle sur les budgets nationaux, la Commission cherche à s’arroger un pouvoir important, sans contrôle ni contre-pouvoir. Non seulement elle se met à dos les Parlements nationaux censés voter les budgets, mais si son souhait était exaucé –ce qui est peu probable– c’est elle-même qui en souffrirait le plus. La Commission passe son temps à regretter "l’hypocrisie des gouvernements" qui prennent des décisions au niveau européen, puis refusent de les assumer devant leurs opinions publiques en disant : "C’est Bruxelles qui nous oblige". Mais qu’est-ce que cela serait si un ministre des finances devait demain se présenter devant son Parlement en disant : “La Commission européenne a censuré mon budget“ ? Dès qu’une question d’argent public serait soulevée –c'est-à-dire à peu près tous les jours– la Commission deviendrait le bouc-émissaire de tous les mécontentements, le père fouettard des peuples.

Cela signifie-t-il que nous devons en rester à de vagues tentatives de coordination des gouvernements nationaux sur une base non contraignante ? Nos intérêts politiques s’opposent-ils à nos intérêts économiques au point de nous interdire un vrai gouvernement économique européen ? Non, si l’on conserve le même objectif en adoptant une procédure plus souple. En amont de la préparation des budgets, un texte d’orientation budgétaire européen pourrait être adopté par le Conseil des ministres des finances et le Parlement européen. Ce texte inclurait les hypothèses et les orientations générales à prendre en compte par chaque Etat. Dans un deuxième temps, la Commission pourrait être chargée de contrôler le respect de ces engagements dans les avant-projets de budgets. Cette solution aurait l’avantage d’impliquer non seulement les parlementaires nationaux, qui pourraient contrôler la position de leur ministre au stade des débats d’orientation budgétaire, mais aussi les parlementaires européens. Le spectre de la technocratie serait écarté et la Commission s’en tiendrait à un strict rôle d’exécutant. A terme, la Commission ne pourra vraiment peser sur la définition d’une politique budgétaire européenne qu’à condition d’être issue du suffrage universel.

Le parlementarisme est né en Europe et en Amérique sur une transaction en forme de slogan : "Pas de taxation sans représentation !" C’est l’esprit de cette transaction qu’il s’agit de retrouver aujourd’hui : “Pas de contrainte budgétaire sans délibération !“


Pierre Haroche

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Universités et entreprises: quel contrat de mariage ?, par Damien I.



Rapprocher l’université des entreprises est une idée simple et séduisante. En ajustant les formations universitaires au plus près des besoins des entreprises, on augmenterait les chances des jeunes diplômés de trouver un emploi rapidement. D’où la volonté de faire participer les entreprises au monde universitaire, en les associant aux organes de direction des universités ou à la conception des programmes. La conception sous-jacente est que les universités ne répondent plus, par les savoirs qu’elles délivrent, aux besoins de l’économie, et c’est ce "décalage" qui expliquerait les difficultés des jeunes diplômés à accéder à l’emploi. On serait alors tenté de se débarrasser des disciplines qui semblent les plus éloignées du "monde de l’entreprise", pour se recentrer sur les savoirs directement utiles, notamment la gestion.


Rapprocher université et entreprises n’est ni bon ni mauvais en soi, et tout dépend des mesures concrètes qui sont prises pour mettre en oeuvre ce slogan. Méfions-nous notamment de son interprétation la plus courante, parce qu’elle est naïve et parce qu’elle ne n’intègre pas le fait que nous vivons dans un monde qui évolue de plus en plus rapidement.

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1/ La naïveté serait de croire que les entreprises inciteront les universités à délivrer des enseignements qui sont, à long terme, bénéfiques aux étudiants. Posséder des savoirs techniques (comptabilité, gestion, logistique) facilite en effet l’accès au premier emploi. Mais ce sont les savoirs généraux qui permettent ensuite de gravir les échelons dans les entreprises. Or, il est probable que les entreprises insistent plus sur les savoirs techniques que sur les savoirs généraux, qui sont moins clairement identifiés et identifiables.

Les qualités d’écriture, de présentation, d’expression, de communication des idées, mais aussi la culture générale et la capacité d’analyse, ne sont pas essentielles en début de carrière. Elles sont cependant nécessaires pour progresser dans l’entreprise et pour accéder à des postes à responsabilité. A l’échelle d’une carrière, des savoirs trop spécialisés sont utiles à court terme mais insuffisants à moyen terme, et l’individu risque de voir ses perspectives se restreindre s’il n’a pas bénéficié d’enseignements généraux et théoriques, lettres, histoire ou mathématiques. Le rapprochement entre université et entreprise ne devrait donc pas se faire au détriment des disciplines qui semblent les moins directement liées à l’entreprise.

2/ Le fait que nous vivions dans un monde qui change rapidement s’explique simplement : les centres d’innovation se multiplient et l’économie devient plus compétitive, notamment parce que de nouveaux acteurs émergent et parce que les barrières au commerce international sont en constante diminution. Dans un tel contexte, les produits et les méthodes de production les moins innovants et les moins rentables ne peuvent pas subsister longtemps, et les entreprises comme les travailleurs doivent se donner les moyens de s’adapter à un rythme soutenu.

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Un Américain au PS, par Pierre Haroche



Le 6 novembre dernier, comme 128 977 autres militants socialistes, j’ai voté dans ma section parisienne. Il se trouve que, le lendemain, je prenais par hasard un verre avec un ami américain de passage à Paris. Très intéressé par la politique française, il écouta avec attention mon exposé fleuri des différentes motions et des personnalités qui les soutiennent.

Soudain, il me demanda avec ingénuité : ”Mais ce vote, que décide-t-il au juste ?” Je répondis, en confiance : ”Il décide de la nouvelle majorité qui dirigera le parti. 
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Discriminer moins pour gagner plus, par Matthieu Niango



Il y a trois semaines, l’épisode de la Marseillaise huée, survenu en pleine débâcle financière, fournit à Nicolas Sarkozy l’occasion d’échapper à une énième réunion de crise pour aller menacer une bande de supporters avinés, et rappeler au monde qu’il est, qu’il fut, qu’il sera, le président de l’identité nationale. Une tentative de diversion grossière mais significative : ces sifflets stupides, et la réaction, bien digne d’eux, qu’ils ont suscitée, manifestent autant le malaise d’une partie des populations d’origine immigrée que l’incapacité du président à maîtriser sa passion des répressions stériles.


Rien n’est dit, en effet, des raisons pour lesquels les symboles de la République sont régulièrement attaqués par les populations d’origine immigrée (ce fut le cas entre autre d’un France-Maroc en novembre 2007). C’est ainsi dans l’indifférence générale et sans commentaire du gouvernement que s’est déroulé, la semaine dernière, le
procès de Daytona, une société fournissant des prestations d’hôtesses de vente et d’animation, condamnée pour avoir établi un fichier ethnique à l’usage de ses clients.

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La réforme du Sénat, un enjeu républicain, par Pierre Haroche



Par un article publié dans l’édition du Monde du 22 juillet dernier, Cristophe Caresche, Gaëtan Gorce, Jean-Marie Le Guen et Manuel Valls dénoncent l’« antisarkozysme pavlovien » des dirigeants de l’opposition qui ont refusé de voter une réforme institutionnelle que beaucoup considéraient comme un progrès et qui reprenait nombre de propositions formulées par la gauche.


Une opposition fondée, mais mal expliquée

Or ce refus, au-delà du simple « réflexe » d’opposition, constituait surtout une tentative de faire avancer la réforme du Sénat que beaucoup d’esprits chagrins disent impossible. L’exigence d’une majorité de 3/5e empêchait la majorité d’agir sans l’aval d’une partie de l’opposition. Dès lors, le PS a tenté d’utiliser –en vain– cette rare occasion pour faire évoluer le statut du Sénat. L’opposition ne se trouve pas souvent en position de force suffisante pour négocier avec la majorité. Dans ce cas précis, la crainte que les socialistes rejettent le texte en bloc et en empêchent ainsi l’adoption aurait pu pousser la majorité à transiger sur la question de la Chambre haute.

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Quel premier secrétaire pour le Parti socialiste ? par Pierre Haroche



A l’approche du prochain congrès du parti socialiste, un certain nombre de critiques traditionnelles à l’encontre du fonctionnement interne du parti refleurissent dans les discours de tous les bords. Devant les militants, la dénonciation des maux chroniques censés miner le parti est en effet devenue un outil rhétorique incontournable.


Un premier type de critique classique vise l’excès des ambitions personnelles qui tendraient à éliminer le débat d’idées et à « caporaliser » le parti derrière un chef. C’est aujourd’hui la position des « reconstructeurs » qui refusent que le congrès se transforme en duel des « présidentiables » désignés par les sondages d’opinion, Bertrand Delanoë et Ségolène Royal, et en appellent à l’élaboration d’une « offre politique » préalablement à la désignation d’un candidat.

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Où va la Cinquième République ? par Pierre Haroche



Les députés socialistes ont annoncé la semaine dernière qu’ils voteraient contre la réforme des institutions en première lecture afin d’obtenir d’ultimes avancées sur l’élection du Sénat et le temps de parole du président.  A l’heure où le sort de la constitution semble devoir se jouer dans une négociation point par point, il est légitime de revenir sur une question d’ensemble : où va la Ve République ?


L’esprit fondamental de la constitution de 1958 réside dans une innovation majeure : un régime parlementaire avec à sa tête un président de la République. La plupart des tensions que le régime a connues depuis lors découlent directement de la difficulté de concilier ces deux aspects
a priori contradictoires.

En théorie, le premier ministre est censé assurer la jointure, en étant responsable à la fois devant le président et le parlement.

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Des municipales au Congrès, par les membres du Club Changer la gauche



Non, la gauche n'a pas gagné les élections municipales du mois dernier. Du moins, elle ne peut se satisfaire de ces succès dispersés. Evidemment, chaque victoire individuelle doit être applaudie et constitue une chance d'influer sur la vie d'une collectivité. Mais l'absence de essein global doit aujourd'hui nous faire réagir: sans lui, aucun succès ne sera jamais une victoire véritable. Identifier la gauche au gouvernement des collectivités territoriales, c'est prendre le risque de laisser pour longtemps à la droite celui du pays. Il est impératif, pour prolonger l'élan de ces élections municipales, d'imaginer une façon de rendre utiles les quatre années d'opposition qui se profilent. Pour cela, deux pistes doivent être explorées en priorité.

Tout d'abord, il faut aller chercher l'énergie là où elle se trouve : dans les collectivités territoriales. La dynamique créée par ce scrutin pourra se concrétiser si la gauche traduit ses succès dans les territoires en propositions de large envergure.
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Pensée écologique et troisième voie, par Henry J. Dicks



L'un des changements politiques majeurs de ces vingt dernières années fut l'élection de Bill Clinton comme Président des Etats-Unis, en 1993. Sa politique dite "de 'troisième voie"' a rendu possible un dépassement du vieux clivage droite/gauche sur des sujets précis. Consciente des conséquences électorales heureuses de cette nouvelle politique, la gauche anglaise a reproduit le schéma en 1997, ce qui a mené à l'élection de Tony Blair. Depuis, les deux pays ont divergé. Pourquoi donc ?


Après le succès de Clinton, tout le monde prédisait la victoire d'Al Gore en 2001. Pourtant, après qu'il a décidé de ne pas fonder sa campagne sur le danger du réchauffement climatique, sujet dont on sait désormais à quel point il lui tient à cœur, son projet a été critiqué pour son manque de substance et de valeurs ; c'est là que s'est jouée toute l’élection. Par la suite, le virage néo-conservateur des Etats-Unis a été ravageur pour l'écologie. Après avoir nié l'existence du réchauffement climatique, l'administration Bush ne l'accepte aujourd'hui que pour justifier des subventions énormes et écologiquement inefficaces en direction de l'industrie d'agro-carburants –l'enjeu est bien entendu de gagner cette industrie, très puissante, à la cause républicaine.

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Jeux Olympiques ou développement durable ? par Henry J. Dicks



C'est l'Angleterre qui accueillera les Jeux olympiques de 2012. Ce n'est pas la France, on l'aura remarqué. Que va-t-elle donc faire avec les nombreux milliards d'euros qu'elle s'était engagée à dépenser pour ces jeux?

Le pays a toujours été très fort dans le domaine des grands projets, comme l'illustrent son TGV, son tunnel sous la manche, ses belles centrales électriques ou sa ligne Maginot!

A défaut de Jeux olympiques, pourquoi la France ne lancerait-elle donc pas un nouveau grand projet?

De quels projets la France a-t-elle aujourd'hui besoin? Dans quel domaine peut-elle montrer une voie à suivre pour le monde entier? La réponse n'a jamais été plus claire. Les grands projets doivent aujourd'hui s'insérer dans la lutte collective contre cet ennemi désormais commun qu'est le changement climatique.
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